Pierre Drillaud (1765-1813) et René Jacques Coigny (1775-1839) capitaines de paroisse de Pugny

Pugny a été un des premiers villages du bocage à s’insurger lors de la révolte antirépublicaine d’août 1792, et sa population a été particulièrement active durant les guerres de Vendée entraînant d’importantes destructions par les armées bleues et de nombreuses victimes.

Le document que nous allons décrire ci-dessous nous permet de découvrir de nouveaux acteurs de la paroisse de Pugny pendant cette abominable guerre civile.

En 1816, alors que le pouvoir de Louis XVIII qui a remplacé Napoléon se consolide, des pensions et secours sont attribués pour les  victimes et anciens combattants des guerres de Vendée. Jeanne Chabot, qui habite le hameau de la Guibaudière de Pugny , sollicite une pension de veuve suite au décès de son mari Pierre Drillaud.

Cachet de la mairie de Pugny en 1816

Sur cette demande de pension, on trouve tout d’abord un certificat médical établi le 26 mai 1816 par Jacques François Chevalier, alors chirurgien à La Chapelle Saint Laurent.

Nous soussignés chirurgien à la résidence de la Chapelle Saint Laurent, arrondissement de Parthenay, département des Deux-Sèvres, certifions à qui il appartiendra avoir vu, traité et donné nos soins au défunt Pierre Drillaud, bordier demeurant en la commune de Pugny qui était atteint d’une « anquilosie » suturée à l’articulation du bras avec l’avant-bras gauche, l’écoulement liquoreux de la suppuration en a détaché quinze esquilles ou petits os ; cette maladie qui a été la cause de sa mort, vient des blessures qu’il a reçu « ainsy » que des courses forcées et vicissitudes du froid pour avoir couché sur la terre pendant les nuits d’hiver. En foi de quoi nous l’avons délivré le présent pour servir et valoir ce que de raison à la Chapelle Saint Laurent.

Le vingt six may 1816 signé Chevalier

Attestation médicale du chirurgien Chevalier sur Pierre Drillaud

Ensuite nous trouvons sur le même document une attestation en faveur de Jeanne Chabot établi par François Vidal, maire de Pugny, reprenant le témoignage de Réné Jacques Coigné et de Pierre Merceron, anciens combattants.

En marge :

Jeanne Chabot veuve de Pierre Drillaud commandant de la 2eme compagnie de la paroisse de Pugny en 1793

Texte de l’attestation :

Nous René-Jacques Coigné commandent la 1ère compagnie de la paroisse de Pugny lors de la 1ère  guerre de la Vendée Pierre Merceron soldat à la même époque, soussignés certifions que feu Pierre Drillaud natif de Pugny le 27 juin 1764 a été commandent de la deuxième division de la commune de Pugny et qu’il était en ladite qualité avec nous à la grande bataille de Luçon, qu’il y fut blessé au bras gauche est à celle de Boisvert à la jambe gauche et qu’il est mort par suite de ces blessures et des grandes fatigues qu’il a éprouvée, qu’il a laissé Jeanne Catherine Chabot sa veuve avec cinq enfant et sans fortune en foi de quoi nous lui avons délivré ce présent pour lui servir et valoir.

Pugny le 24 mai 1816 signé Merceron, Cougné et Vidal, maire

Attestation Coigné, Merceron

Par ce document exceptionnel, nous apprenons donc qu’en 1793, il y avait deux compagnies de combattants de Pugny dans l’armée catholique et royale. Ces compagnies ont notamment combattu à la grande bataille de Luçon (probablement celle du 14 août 1793) et à celle de Bois Vert (lieu inconnu à recroiser avec d’autres sources).

René Jacques Coigné (1775-1839)

Le commandant de la première compagnie était René Jacques Coigné, né à Pugny le 11 avril 1775 à la Maupetitière. On peut s’étonner des 18 ans de ce commandant en 1793 et peut-être douter de son rôle effectif.  Cependant il était concerné par la  levée en masse de 300 000 célibataires  de 18 à 25 ans  qui provoqua la grande révolte vendéenne.

René Coigné a survécu aux événements  et s’est marié à Pugny le 26 avril 1805 avec  Jeanne Charlotte Fazilleau. Ils eurent ensemble 9 enfants. Il est décédé le 19 avril 1839 à Moncoutant après avoir été bordier à la Maupetitière puis à la Coulaisière de Pugny.

Pierre Drillaud (1765-1813)

Le commandant de la seconde compagnie était Pierre Drillaud, bordier à la Guibaudière de Pugny, apparemment né le 27 juin 1764 (contrairement à ce qu’indique l’attestation, on ne trouve pas son acte de baptême à Pugny).

Il s’est marié le 17 septembre 1787 à  Jeanne Chabot, également de Pugny. Ils eurent ensemble au moins 4 filles. Pierre Drillaud est décédé  le 28 juillet 1813.

Signature de Pierre Drillaud et de son beau-père François Chabot sur l’acte de mariage de 1787

Nous avons pu trouver au sujet de la famille Drillaud deux documents qui nous donnent davantage d’informations.

Le premier est un extrait du livre de l’abbé Etienne Mulon sur l’histoire de Pugny.  Le couple Drillaud a abrité le curé de Pugny Michel Guillon lors des périodes de persécution religieuse des guerres de Vendée.  Une cache spéciale avait été aménagée dans la maison de la Guibaudière. Pierre Drillaud, lui même recherché, se serait caché dans un grand chêne près de l’étang de Courberive.

Le livre de l’abbé Mulon n’est pas infaillible, puisqu’il positionne Jeanne Chabot comme la nourrice de la famille De Mauroy, seigneurs du château. C’est peu probable puisque Catherine, la fille du marquis, était née en 1771. Est-ce la mère de Jeanne Chabot qui en aurait été  la nourrice?

Nous avons également retrouvé dans le relevé du registre paroissial de Courlay la sépulture donnée par l’abbé Pierre Texier  à Alexandrine Drillaud, 2 ans, le 7 octobre 1794, en présence de son père Pierre et de son grand père François Chabot. Le décès de cette fillette s’est produit alors que Pugny et ses alentours  étaient alors régulièrement soumis à des raids républicains du camp de Largeasse. Une partie de la destruction de Pugny est bien identifiée à cette période. Alexandrine a-t-elle été victime des exactions de soldats bleus? Est-elle décédée d’une maladie infantile comme la varicelle (la picotte) qui faisait à l’époque de nombreuses victimes ?  A-t-elle succombé aux terribles conditions sanitaires d’un camp de fortune où ses parents se seraient réfugiés?

Quelques années plus tard, l’abbé Texier deviendra un des fondateurs de la petite église de Courlay et Pugny une paroisse où la dissidence aura l’adhésion de toute la population.

L’autre témoin du document est Pierre Merceron dont nous allons essayer de reconstituer l’état civil et de raconter l’histoire dans un autre article.

J-P Poignant

Merci à notre ami Rémy Billaud et à M. Raphaël Supiot Directeur des archives municipales de Parthenay, qui nous ont fait suivre le document de demande de pension pour la veuve de Pierre Drillaud.

Merci à Raymond Deborde qui m’a transmis les informations généalogiques  sur la famille Drillaud  et à Pascal Paineau qui m’a communiqué les extraits des registres paroissiaux de Courlay.